Le Vilain Petit Canard fut écrit par Hans Christian Andersen en juillet 1842, après l'échec de la pièce de théâtre L'Oiseau dans le poirier, qui fut sifflée à la première. Dans ce conte, Andersen a placé les principales périodes de sa vie.
Résumé :
Quand le vilain petit canard est né, il ne ressemblait pas à ses frères et soeurs de couvée. Rejeté de tous, à cause de ce physique différent, il est contraint de quitter « sa famille » et de partir, loin, pour ne plus subir leurs moqueries et leurs coups. Sur son chemin, ceux qu'il rencontre ne l'acceptent pas vraiment non plus. Un jour, cependant, ébloui par la beauté des cygnes, le vilain petit canard décide d'aller vers eux. Les cygnes ne le chassent pas et bien au contraire l'accueillent comme l'un des leurs. Et pour cause... Le vilain petit canard a grandi et s'est métamorphosé en un magnifique cygne blanc...
Analyse :
On peut parler de récit de formation, voire de récit initiatique à propos du Vilain Petit Canard, qui montre comment l'enfant, en grandissant, doit apprendre à se connaître lui-même et s'accepter tel qu'il est, même si son entourage lui renvoie de lui-même une image négative et ne l'aide pas à développer l'estime de soi.
Mais une interprétation autobiographique retiendra la revanche du poète (le cygne) sur les gens ordinaires (les canards), lorsqu'il découvre un milieu qui lui permet de reconnaître son talent.
Né dans un milieu petit-bourgeois, Andersen enfant s'est senti dans la situation du vilain petit canard. Il semble qu'il ait eu une apparence efféminée et sa correspondance révèle des penchants homosexuels, ce qui a contribué à son impression d'être différent et rejeté.
Le thème du génie incompris est un thème romantique qui revient assez souvent dans la poésie du XIXe siècle, chez Alfred de Vigny, chez Charles Baudelaire montrant l'incompréhension entre le poète des cîmes et le vulgaire dans L'Albatros. Théodore de Banville (Les Torts du cygne), Sully Prudhomme (le Cygne) exploiteront aussi ce thème que certains critiques ont cru retrouver dans Le Vierge, le vivace.. de Stéphane Mallarmé. On le trouve aussi dans le roman, par exemple dans Le Rouge et le noir, de Stendhal dont le héros, Julien Sorel, jeune homme de condition modeste mais d'une intelligence exceptionnelle, souffre d'être né dans un milieu grossier et brutal, ou chez Villiers de L'Isle-Adam, dont le héros Tribulat Bonhomet se délecte à la bourgeoise à torturer psychologiquement puis tuer les oiseaux poètes.
Bruno Bettelheim critique assez durement ce conte en remarquant qu'il incite l'enfant à se croire d'une espèce différente de son entourage. Il s'agit selon lui d'un conte qui s'adresse plutôt aux adultes.